Je viens de me faire Catcaller par un salaud D’à peine treize ans.
L’inspiration pour ce senryū me vient d’un livre que j’ai lu il y a fort longtemps, dans le cadre d’un cours de cégep: La fabrication des mâles (1975) de Nadine Lefaucheur et Georges Falconnet.
Les deux auteurices avaient à l’époque fait une enquête sociologique auprès de centaines d’hommes pour comprendre comment ont «devient homme» dans une société patriarcale. Leurs conclusions étaient que ce n’est pas la biologie qui gouverne les comportements masculins, mais une série de codes et de normes qui leur sont inculqués depuis leur plus jeune âge, qui sont résumés à trois mots: puissance, pouvoir et possession.
Extrait:
La manière d’entrer en contact avec une femme, de la «draguer», de lui faire la cour demande tout un apprentissage. Les théories biologisantes sommaires extrêmement en vogue, qui comparent la conduite sexuelle masculine à l’agressivité des mâles d’autres espèces animales, et lui donnent ainsi une justification, sont très dangereuses. Ce serait dans la nature humaine, dans le code génétique qu’il faudrait chercher l’explication du fait que l’homme se montre sexuellement plus entreprenant que la femme. Réfuter ces thèses n’est pas notre objet ici, mais tout ce que nous avons pu observer de la formation des conduites masculines s’oppose à elles.
C’est la norme sociale qui veut que, chez nous, la femme attende, plus ou moins sagement les avances masculines. Une femme qui inverse les rôles en manifestant ouvertement son désir sexuel, s’expose à la punition d’ordre moral (être considérée comme une putain) mais aussi à une frustration concrète : la fuite de l’homme désiré, ou son impuissance. Plusieurs hommes nous ont avoué perdre tous leurs moyens dans de telles situations.
La technique de drague de la plupart des adolescents n’est pas encore au point ; ils trouvent difficile l’apprentissage de leur rôle et ne savent pas très bien comment s’y prendre pour sortir de leur misère sexuelle. La condition masculine ne leur paraît pas simple, parce qu’elle les oblige à faire les avances et à souvent essuyer des refus pénibles pour leur amour propre. Plus ils sont jeunes et plus ils souhaitent que les filles fassent les premiers pas ou, au moins, la moitié du chemin : cela, loin de les rendre impuissants, les excite au plus haut point. Ce désir ne signifie pas qu’ils souhaitent renoncer au rôle dominant, mais au moins qu’ils ne sont pas encore enfermés dans un rituel rigide.